Des lignes directrices de gestion pour gérer la pénurie de promotions ?

Publié le 02/07/2020

Le premier GT consacré à la partie promotions des Lignes directrices de gestion (LDG) s'est tenu en période de mobilités/mutations dans les différentes directions. La CFDT et la CFTC ont dénoncé les conditions dans lesquelles se tiennent les campagnes annuelles, du fait notamment de la mise en oeuvre des nouvelles LDG mobilités. La déclinaison de la loi de transformation de la Fonction publique reste la priorité du gouvernement et c'est désormais sur les modalités de gestion des promotions que les travaux débutent. 

Ce groupe de travail s’est tenu dans un contexte et sous un format particulier, avec une partie des participants en présentiel, une partie en visioconférence et une partie enfin en audioconférence. La CFDT et la CFTC ont rappelé, en déclaration préalable, qu’il reste fort à faire pour développer ces outils dans l’ensemble du ministère, notamment pour éviter toute discrimination envers les agents repris dans la catégorie des personnes fragiles.

Présidé par Mylène Orange-Louboutin représentant le Secrétariat Général de Bercy, ce groupe de travail était réuni pour fixer le cadre général des LDG promotions au niveau ministériel avant que chaque direction commence à travailler sur la déclinaison directionnelle.

Le retour de l'ancien monde

Le temps dévolu aux échanges n’a permis d’examiner qu’environ la moitié du document de travail proposé. En effet, le texte proposé est très flou et peu opérationnel. Les imprécisions de rédaction et de terminologie étaient telles que les discussions pour les éclaircir ne pouvaient être menées dans un laps de temps aussi court.

La CFTC et la CFDT se sont étonnées que cette réflexion s’ouvre, comme si rien ne s’était passé, alors que nous sortons tout juste de la crise COVID. Décidément, pour le SG le « monde d’après » c’est revenir d’urgence aux chantiers d’avant. Après la lutte contre le virus, la priorité de l’administration serait-elle donc de se débarrasser au plus tôt des CAP de promotions ?

Ce chantier s’ouvre alors qu’aucun bilan n’a été tiré de la mise en œuvre par chacune des directions des MEF des LDG mobilités. Or, force est de constater que les LDG mobilités n’ont pas brillé par leur transparence. Les agents des MEF se sont retrouvés bien démunis quand les mouvements sont sortis.

 

Des volumes de promotions très insuffisants

Les fédérations syndicales ont également indiqué qu’il n’est pas possible de dissocier le mode de promotion de leurs volumes annuels. Si les volumes de promotions continuent de se réduire comme peau de chagrin (faiblesse voire inexistence actuelle des plans de qualification ministériels), alors les LDG n’auront aucun effet motivant pour les agents et ne constitueront en rien un « levier managérial », ce sera plutôt l’effet inverse, et les LDG resteront à l’état de coquille vide.

L’Observatoire interne annuel réalisé auprès des agents de nos ministères démontre que les insuffisantes possibilités de promotions sont, dans le vécu professionnel, l’élément qui est jugé le plus négativement par les agents, engendrant aigreurs et frustrations. Les LDG promotions ne vont absolument rien arranger puisque les promotions seront prononcées désormais dans la plus totale opacité, sans aucun contrôle des « tiers de confiance » que sont les syndicats. La situation risque donc de devenir rapidement explosive.

 

Des règles trop imprécises

Les fédérations ont donc demandé au SG de cadrer l’exercice, de sorte que les directions ne s’octroient pas des droits trop exorbitants.

Mme Orange-Louboutin a répliqué que le niveau ministériel se devait précisément de ne fixer que des règles à caractère général avec seulement un niveau minimal de garanties. Le volet directionnel devra compléter ensuite cette esquisse pour tenir compte des us et coutumes de chaque direction. L’idée (selon la SG) n’est pas de faire table rase de tout ce qui s’est fait jusqu’à présent mais de conserver les modus operandi propres à chaque direction, dans le respect des statuts. Étonnamment, c’était exactement le rôle des CAP !

La CFDT et la CFTC s’interrogent sur la force et la portée des LDG ministérielles : si elles sont trop généralistes et trop peu cadrées, elles ne s’imposent pas aux directions.

C’est cette faiblesse de cadrage, déjà dénoncée par la CFDT-CFTC, qui a permis à la DGFIP de s’affranchir de leur respect pour la campagne de mutation 2020. Dans d’autres administrations, les LDG n’ont pas non plus été appliquées correctement. Mais la faute en est imputée à la crise sanitaire, qui a bon dos pour justifier certains dysfonctionnements !

Le but principal de la Loi de transformation de la fonction publique n’était pas la définition concertée de lignes directrices de gestion mais bien la suppression pure et simple des CAP, et c’est chose faite.

Les LDG ne sont ni contraignantes ni opposables en tant que telles, et ne sont pas non plus réglementaires. Aucun organe paritaire n’est prévu non plus pour contrôler la compatibilité et l’adéquation des LDG directionnelles aux LDG ministérielles. L’INSEE, à ce stade de la réflexion, semble même avoir envisagé de s’affranchir purement et simplement de rédiger ses propres LDG promos, et de s’en tenir au cadrage ministériel… tellement vague qu’il laisse la porte ouverte à tout et n’importe quoi !

La CFDT-CFTC demande donc un outil de vérification de conformité.

 

Absence de transparence et de de droit de recours pour les agents

Tout le projet de texte LDG oscille donc entre la nécessité légale, imposée par la Loi de transformation de la Fonction Publique, d’avancer vers un pouvoir accru des administrations, corrélé à un affaiblissement des syndicats, et la volonté affichée de maintenir une certaine « transparence » qui à première vue semble bien opaque. Affirmation de promotions au mérite pur, amoindrissement du critère ancienneté, marqueurs d’engagement professionnel, « faisceau d’indices » (sic) permettant de déceler les capacités du candidat à la promotion, valorisation du parcours professionnel… Tous ces termes généraux semblent bien dangereux lorsque laissés à la main de la seule administration. Soulignons par exemple le paradoxe entre la spécialisation demandée aux agents enfermés dans leur filière (poste à profil = expertise) et l’exigence de mobilité (agents multitâches). Au final, dans tout ce méli-mélo, quel critère ou “faisceau de critères” déterminera le « mérite » et donc la promotion ?

La CFDT-CFTC poursuivra son action pour obtenir des critères garantissant la lisibilité pour les agents.

Pour la CFDT-CFTC, cette première salve d’échanges a surtout mis en lumière une démarche très hésitante et précipitée de Bercy pour mettre en œuvre des principes théoriques bien éloignés du fonctionnement classique de notre administration. Le SG doit donc revoir sa copie

La CFDT-CFTC sera particulièrement attentive à la discussion de la suite du projet de LDG, envisagée mi-juillet ou en septembre. Elle demandera au SG d’ajouter à son texte des dispositions opérationnelles pour assurer la transparence des processus de promotion et le droit de recours des agents.