Coronavirus – La DGFiP face à plus de 10 ans d’impréparation et de déstructuration

Publié le 18/03/2020

A la suite des annonces présidentielles du 16 mars, une 3e réunion téléphonique sur la « gestion de crise » du CORONAVIRUS se tenait hier, 17 mars, avec les représentants du personnel. Les propos du directeur général (DG), Jérôme Fournel, ont été clairvoyants à défaut d’être rassurants sur la situation instantanée de notre administration.

A l'occasion de la 3e réunion téléphonique sur la « gestion de crise » du CORONAVIRUS, le DG s'est dit conscient que ses services étaient dans une phase d’ajustement où tout n’est pas parfait. Ses mots sont forts : « on essaye de colmater - il y a de l’inquiétude - des chefs de service ont pu être paniqués ». Pour le DG, il faut essayer de réduire les inquiétudes. La CFDT Finances publiques veut bien admettre que notre administration s’ajuste face à cette crise d'ampleur ...sauf qu’elle était un temps soit peu prévisible depuis plusieurs semaines. En tout cas, le problème n’est certainement pas à situer au niveau des chefs de service !

Lors de cette conférence, la CFDT Finances publiques a dénoncé l’absence de préparation et d’anticipation.

La CFDT Finances publiques a réaffirmé la priorité n°1 : réduire le nombre de contacts parmi la population, et donc pour les personnels. Or, les exemples remontés du terrain ont démontré que cette priorité avait été très loin d’être respectée dans la période. Ainsi :

  • Certains chefs de service ont désigné quasiment tous les agents dans la catégorie des personnes indispensables ;
  • Des trésoreries restaient ouvertes alors que celles d’une DDFiP voisine étaient fermées ;
  • Certaines missions étaient jugées prioritaires ...alors qu’elles n’apparaissaient pas l’être ;
  • Des services fonctionnaient ante-pandémie, donc sans mesures prises, notamment distanciation sociale.

Notre message à destination du DG a été clair. Les fonctionnaires seront au rendez-vous car ils connaissent le sens de l’Etat. Ils assureront les missions prioritaires, mais nous demandons que cela le soit avec un minimum d’agents contraints d’être présents dans les services. Par ailleurs, nous demandons dans les hôpitaux que tout soit fait pour éviter au maximum la fréquentation des guichets des trésoreries hospitalières par les usagers (ex. : inciter le paiement dématérialisé, favoriser les opérations à distance, etc.). Le DG s'est engagé à ce que les agents soient traités comme les personnels administratifs des hôpitaux en bénéficiant des mêmes moyens de protection : gel… et masques (NDLR : il faudra alors enseigner le bon usage du port d’un masque s’il s’avère vrai que son efficacité requiert des prescriptions particulières).

Informé par la CFDT Finances publiques de certaines situations, le DG nous a répondu sur les points suivants :

  • Télétravail et applicatifs métiers : certaines applications, comme RMH (permet le traitement de la paye des agents hospitaliers) sont limitées. La DG s’est déclarée en mesure de déporter les autorisations sur une autre trésorerie qui aurait les personnels en mesure de traiter les opérations. Cette procédure pouvant être faite pour les autres dépenses.
  • ASA et ARTT : les agents pouvant bénéficier d’ASA dans le cadre du Covid19 ne seront pas lésés sur leurs jours ARTT.
  • Garde d’enfants : les ASA pour garde d’enfants ne sont pas plafonnées dans la saisie dans SIRHIUS (dans le cadre du Covid19).
  • Pause méridienne : en l’absence de restaurant administratif, il y aura bien attribution de Titres restaurant de façon rétroactive.
  • Réponses aux agents : le DG s’est déclaré favorable à la proposition de la CFDT Finances publiques de mettre en place une FAQ (foire aux questions) pour répondre aux questions récurrentes.

Ce qui est clairement inquiétant, pour les personnels comme leurs représentants, c’est l’image d’une administration qui – comme d’autres – n’est visiblement plus habituée à anticiper les situations de crise majeure.

Le DG a d’ailleurs indiqué que les derniers travaux sur des plans de continuité d’activité remontaient à plus de 10 ans. Consternant état des lieux. Pourtant, l’actualité a apporté son lot d'événements permettant de modéliser des plans de gestion de crises : attentats, H1N1, cyclones, tempêtes et autres risques climatiques, risques nucléaires, etc. Il est vrai que depuis plus 10 ans, la DGFiP est surtout en perpétuelle réforme et déstructuration. Subissant, en même temps, réductions massives d'effectifs par dizaine de milliers et réorganisations de fortune…

Si l’heure n’est pas encore à « instruire des procès », on ne manquera pas de rappeler que « gouverner, c’est prévoir », diriger, c’est choisir et décider. Soyons clairs, la conduite de l’Etat par des gestionnaires dévots des seuls dogmes comptables, et doux rêveurs de la « start-up nation » a plus que démontré ses limites. Il ne sera plus possible d’éviter un débat profond où chacun aura à assumer ses responsabilités. La CFDT Finances publiques ne se contentera pas des messages d’encouragements de directeurs ou de ministres. Les fonctionnaires devront être reconnus en tant que tel et la légitimité de leur statut, comme son utilité, rappelée fermement.

En toute franchise, et nous lui en savons gré, le DG a confirmé qu’on était loin d’une application parfaite des consignes mais que la situation commençait à évoluer positivement entre lundi et mardi en précisant que sur les missions prioritaires il allait y avoir une phase d’ajustement et qu’il faudra tenir sur la durée.

Dans un département, le DG a dû intervenir face à des menaces de retenue sur salaire proférées par des responsables locaux. Dans un autre, il a fallu « recadrer » les choses car la notion de priorité n’était visiblement pas appréciée au bon niveau par la direction locale.

Dans l'intérêt des agents, de tous les agents, et pour leur sécurité, la CFDT Finances publiques n’hésite pas à faire remonter ce type de situations ou de dérives.

Autres précisions par l'administration :

  • mesures sanitaires : pour l'obtention de gel hydroalcoolique, c’est un peu « le système D » concède le DG. Chacun sait qu’il y a des ruptures de stock et que les commandes ne peuvent pas être passées, l’approvisionnement n’étant alors possible qu’à titre individuel.
  • Télétravail et matériel informatique : le DG a précisé qu’un plan de redéploiement d’ordinateurs portables permettrait de doter les personnels affectés sur des missions prioritaires et qui, sans l’avoir anticipé, devaient maintenant être en télétravail. A cette fin, les portables des stagiaires de l’ENFiP pourraient ainsi être « réquisitionnés » pour réaffectation.
  • Mouvements de mutation : ils pourraient être décalés tout en permettant aux agents d’être informés avant la date d’effet des mouvements prévus initialement.

En synthèse, le DG a demandé de l’indulgence pour les 48 premières heures suite aux annonces présidentielles de dimanche dernier, et a indiqué que ses équipes travaillaient à réduire les effectifs présents dans les services. Il s’est engagé à donner l’information aux OS sur l’évolution des présents dans les services.Au 17 mars, il y avait 59 % d’agents présents et 41 % d’agents absents (20 % en congés, 13 % en ASA et 8 % environ en télétravail). Par ailleurs, la DG a fait part de réactions d’élus et du ministre qui s’inquiétaient de voir certaines trésoreries fermées (sic) craignant que les opérations de règlement de dépenses – dont la paye – et d’encaissement de recettes ne soient plus possible.

Le DG a remercié enfin les organisations syndicales – enfin mieux écoutées – pour leurs questions permettant de contribuer à résoudre plus rapidement des situations délicates…