Groupe de travail système d'information enfin et décevant

Publié le 17/02/2023

Une fois de plus, l’alliance CFDT-CFTC ne peut que déplorer le peu de temps que la direction accepte de nous accorder pour traiter de ces sujets qui vont pourtant marquer longuement le quotidien des informaticiens de la DGFiP. Une demi-journée pour traiter une dizaine de fiches. Une demi-journée pour essayer de comprendre les détails qui nous auraient échappé et poser les questions appropriées. Une demi-journée pour exprimer les inquiétudes des agents impactés et vous donner à voir l’envers du décor. Nous comprenons bien, M le Président, que votre emploi du temps est chargé, mais il nous semble difficile de développer un dialogue social constructif dans de telles conditions. Pour mémoire, le rapport de l'IGF désigne l’informatique comme « la plus grande vulnérabilité de la DGFIP » et la guerre en Ukraine rappelle qu’il est urgent de s’en préoccuper.

Avec un premier retour dans cet article

1) Accélération de la transformation numérique – emplois 2023

La première fiche a pour but de souligner l’effort budgétaire réalisé en faveur de l’informatique pour lui permettre de réaliser les objectifs du COM. Il y est question de la création de 300 emplois, voire 310 si on ajoute les 10 emplois administratifs encore prévus à Montbard et qui ne seraient pas pris sur un contingent existant. Il s’agit pour partie d’emplois et non de postes : les 40 « renforts métiers liés » qui doivent accompagner des actions comme le passage à la TOIP ne sont clairement pas perçus comme pérennes. On peut imaginer que c’est un domaine où les contrats de chantiers chers à M Macron trouveront à exprimer leur plein potentiel en matière de précarité. Emplois ou postes, il va falloir trouver des candidats pour les occuper et la fiche reprend la liste désormais classique des efforts faits pour améliorer l’attractivité de la DGFiP. A ce stade, il s’agit donc malheureusement simplement d’annoncer la création de 310 chaises vides qui viennent rejoindre les centaines de postes vacants dans l’informatique à la DGFiP. Le passage du virtuel au concret se faisant attendre, nos collègues redoutent donc d’avoir pour finir plus d’étudiants en alternance à former que de soutien dans leur quotidien.

Les concours de la DGFiP n’ayant qu’un succès modique et les capacités d’accueils de l’école de Toulouse étant de toute façon limitées, il est clair que ces emplois seront pourvus pour l’essentiel par des contractuels. La logique de recrutement diffère donc sensiblement de ce qui nous avait été présenté lors de la présentation de la loi de transformation de la fonction publique : il ne s’agit plus de s’adjoindre la compétence de quelques profils pointus, mais de recruter massivement par voie de contrat des compétences comparables à celles dont notre administration dispose en interne. La direction est-elle consciente des tensions que les disparités de traitement génèrent dans ses services ? Se souvient-elle que le recrutement par concours et le statut de fonctionnaires sont des gages en matière de sécurité dans un monde de moins en moins prévisible ?

Dans la compétition avec les employeurs privés pour recruter, nous ne nous battons pas à armes égales. Non seulement, la modicité des salaires pose problème, mais nous imposons aux nouveaux arrivants des contraintes géographiques qui sont souvent difficiles à accepter, des évolutions de carrière limitées, un carcan administratif qui masque le dynamisme des équipes. Les dernières transformations en matière de ressources humaines ne vont pas faciliter les choses avec en particulier la généralisation des postes aux choix qui va à la fois accroître la concurrence entre les services et bloquer dans leur spécialité ceux qui voudraient voir leur carrière évoluer.

Alors que la dette technique n’en finit pas de se résorber et que les incessantes restructurations sont de moins en moins bien supportées, vouloir accélérer la transformation nous semble un pari bien hasardeux. Et si l’on met les choses dans l’ordre pour éviter de construire sur du sable, la première pierre de cette politique devrait être d’augmenter les capacités d’accueil de l’ENFiP. La fiche qui nous est proposée indique malheureusement que ce n’est pas le chemin que nous empruntons.

2) Réorganisation SSI - DPN : bilan et perspectives

La restructuration des services informatiques de centrale suit son cours et la direction semble satisfaite du résultat à l’exception de quelques ajustements restant à opérer. Les équipes situées en aval dans les DiSI (MOE déléguée, Intex, exploitation, AT) ressentent plutôt une profonde désorganisation et une perte considérable de compétence qui oblige bien souvent ces services à pallier l’incapacité des nouvelles équipes à s’approprier les responsabilités qui sont les leurs. Les fiches d’incident ne sont pas traitées, les interlocuteurs ne sont pas connus, les chantiers de migration ont pris un retard considérable… Autant dire que nous ne partageons pas l’optimisme affiché dans cette fiche et que nous sommes inquiets de voir la fameuse dette technique se creuser à nouveau. Les agents concernés ne sont pas en cause. Mais en se jetant à corps perdu dans les chantiers porteurs et valorisants de l’analyse des données, la direction a réduit au minimum le tuilage des équipes et refusé de voir l’ampleur du travail de formation et de transfert des compétences que cette réorganisation supposait.

La fusion MOA/MOE a eu surtout pour mérite de faciliter les arbitrages (il n’y a plus qu’un décideur là où il y en avait deux). Il est clair que les équipes se félicitent de cette évolution qui leur donne plus de visibilité dans leur quotidien, mais il est clair aussi qu’à plus long terme les utilisateurs pourraient déchanter.

Nous considérons donc avec intérêt l’annonce de la mise en place d’une « équipe «métier MOA» au sein du bureau SI1 » et attendons donc ce jour des éclaircissements sur ce point.

3) Création du centre de qualité des données de Montbard – point d’étape

Comme prévu, le chantier de rénovation de Montbard a pris du retard, mais la municipalité a fait en sorte d’accueillir correctement nos collègues (dont certains rejoignaient la DGFiP à cette occasion). Il reste à souhaiter que les problèmes de chauffage soient rapidement résolus. C’est d’autant plus urgent que s’il s’agit d’un défaut d’isolation le problème sera à nouveau criant dès cet été.

La dispersion des agents étant importante, nous espérons aussi que la direction veillera à rendre le recours au télétravail aussi souple que possible pour limiter les déplacements et la fatigue résultante. En tout état de cause, la rotation du personnel risque d’être notable du fait des missions confiées et des conditions de recrutement : la direction aura tout intérêt à soigner l’attractivité du site.

4) Gestion de la dette technique : maintien en condition technique et modernisation

Comme nous l’indiquions ci-dessus, la dette technique a quelques points communs avec le tonneau des Danaïdes. Le fonctionnement par à-coups du COM, comme l’avait été en son temps le programme Copernic, n’est pas étranger à cette situation. Et l’incapacité de la DGFiP à recruter en quantité et qualité voulues les compétences dont elle a besoin ne fait qu’aggraver les choses : on ne peut pas boucher tous les trous à la fois. En recourant à des prestataires externe, on crée les conditions pour provoquer de futures lacunes dans les compétences puis les difficultés pour maintenir ces applications. Il est nécessaire que notre administration anticipe l’obsolescence des logiciels. Elle doit de même, par la mise en place d’une GPEEC (Gestion Prévisionnelle des Effectifs, des Emplois et de Compétences)  digne de ce nom, assurer la formation à long terme des collègues travaillant sur des technologies reconnues comme obsolescentes, mais qui tardent à être remplacées. Les deux aspects (dette technique et manque de formation) ne sauraient être dissociés ne serait-ce que parce que, soumis à la pression des délais à respecter, les agents se tournent naturellement vers la technologie la mieux maîtrisée et qui n’est pas nécessairement la plus « durable ».

5) Bilan de l’enquête de satisfaction informatique annuelle 2022

On notera que cette enquête remonte au printemps 2022, c’est-à-dire avant que la réorganisation des services centraux devienne vraiment perceptible. On notera aussi que le renouvellement des postes de travail ou l’élargissement des accès à Internet peuvent donner aux utilisateurs un sentiment d’amélioration, sans qu’il y ait de réel progrès au cœur de notre informatique. On notera enfin que le taux de participation de 25 % sur un sujet qui touche l’immense majorité de nos collègues pose question (l’échantillon n’est pas nécessairement représentatif, mais les quelques visites que nous pouvons faire dans les services suscitent systématiquement questions et doléances lorsque les agents apprennent la présence d’un informaticien). Nous y voyons une forme de lassitude face à une multiplication des sondages dont les résultats, lorsqu’ils sont connus, ne semblent avoir que peu d’effets concrets (à quoi bon redonner à chaque fois la liste des applications dont les dysfonctionnements sont bien connus ou qui se font attendre depuis des années).

De même, le moindre recours à l’AT peut être vu aussi bien comme le signe d’une amélioration de la qualité des applications que comme un découragement face à la lourdeur des procédures pour y accéder. On peut aussi imaginer que les collègues progressent dans leur maîtrise des outils, s’informent plus efficacement sur l’état des applications ou oublient moins souvent leur mot de passe. Il serait donc présomptueux de penser que seule l’amélioration de la qualité des applications peut expliquer cette évolution.

Ceci dit, nous sommes évidemment satisfaits de voir que le difficile travail de nos collègues de l’assistance est reconnu ainsi que l’ensemble des efforts de ceux des SI. Nous prenons acte des objectifs d’amélioration prévus, mais nos remarques précédentes sur les effectifs disent assez que nous ne voyons pas bien comment ils pourraient être atteints.

6) Point d’Etape ToIP

Les retours que nous avons sur la TOIP sont moins flatteurs que ce que veut bien en dire cette fiche qui présente de nombreux biais. Certes, les grandes coupures de service sont derrière nous, mais ce n’est pas une raison pour présenter comme un « retour à la normale » le fait que la plupart des communications aboutissent : les coupures, même de faible durée, persistent et la qualité du son n’est pas toujours conforme à ce que devraient permettre des transmissions numériques. Certaines fonctionnalités de base qui sont pourtant le B-A-BA d’une telle infrastructure, comme le transfert d’appel semblent manquer.

Cette différence de perception s’explique : les problèmes d’infrastructure ont été tels que la direction en a perdu de vue les autres aspects pourtant essentiels. C’est ainsi que cette fiche n’évoque qu’à peine le rôle pourtant fondamental des équipes d’assistance locale (SIL et CID) des DiSI et fait l’impasse sur la charge de travail que ce déploiement a représenté et représente encore. De même, les utilisateurs impactés n’arrivent pas à savoir si les difficultés qu’ils rencontrent sont dues aux terminaux employés, au réseau local, ou à une mauvaise interconnexion de l’infrastructure DGFiP avec celle de leurs interlocuteurs. Il ne suffit pas d’avoir une bonne infrastructure pour avoir une bonne qualité de communication : ça n’en est qu’une condition.

Ce manque d’intérêt pour les difficultés concrètes du terrain se retrouve avec l’utilisation de l’outil OST qui, rappelons-le, n’est arrivé dans les services concernés que près d’un an après l’ouverture du chantier. Il semble ici nécessaire de rappeler qu’il s’agit d’un instrument de coordination des opérations entre les différents acteurs, mais que ce n’est pas un outil pertinent ni fiable de reporting. Cela a été clairement indiqué lors du séminaire de l’assistance du 8 décembre 2022. Comme le savent les informaticiens, il est rarement judicieux d’utiliser un logiciel à autre chose que ce pour quoi il a été conçu.

Enfin, la précipitation à installer la ToIP avant que la fibre n’ait été correctement déployée, a provoqué de nombreux dysfonctionnements qui mettent une pression inutile sur les agents participants à son installation. Il reste donc à espérer que la suite du projet sera conduite sur la base d’indicateurs plus fiables et avec des objectifs plus réalistes.

7) Présentation des projets immobiliers 2023 SSI - DPN

Que ce soit d’un point de vue écologique ou économique, personne ne peut se satisfaire de voir de vastes étendues de bureaux quasi-déserts parce que le personnel est en télétravail, mais néanmoins chauffées ou climatisées. Mais les informaticiens de la DGFiP ne sont pas des poules pondeuses élevées en batterie et chargées de produire chaque jour leurs cinquante lignes de code réglementaires faute de quoi elles seront envoyées à l’abattoir. Certains, plus poètes que les autres, peuvent se contenter du bureau virtuel d’une machine tout aussi virtuelle fonctionnant dans un nuage évanescent. Mais la plupart ont avec le travail une relation un peu plus incarnée : ils aiment bien retrouver leur bureau avec une plante verte, un fauteuil réglé en fonction de leur morphologie, une souris adaptée à leur pathologie, de la documentation glanée ici ou là, une tasse léguée par un collègue parti en retraite, une photo… et des collègues qu’ils retrouvent parfois avec plaisir…

Que la généralisation du télétravail et le déploiement de nouveaux outils oblige à repenser l’organisation du travail, nous voulons bien l’entendre. Mais la réponse ne peut se limiter à décréter un ratio de 0,7 place et un caisson de trente litres par agent. Nous ne pouvons pas non plus accepter un système dans lequel il faut se battre chaque matin pour les meilleures places (celles où les fenêtres ne provoquent pas de reflets parasites sur les écrans, où la climatisation ne souffle pas un courant froid tout l’hiver, où l’on peut travailler sans être distrait par d’incessants va-et-vient…), places dont sont exclus par construction celles et ceux qui doivent emmener les enfants à l’école ou sont tributaires des transports en commun.

Nous reconnaissons que le problème n’est pas simple, mais y apporter des réponses simplistes ne nous rapproche malheureusement pas de la solution. Il y a donc urgence à ouvrir un débat sérieux et exigeant sur le sujet, puis à y consacrer le temps et les moyens nécessaires. La DGFiP prétend vouloir améliorer son attractivité. Si ça n’est pas un mot creux, il serait temps qu’elle affiche des améliorations concrètes en matière de conditions de travail.

A toutes fins utiles, nous rappelons que l’objectif de cette concertation ne doit pas être d’obtenir 80 % de satisfaits, mais de ne laisser personne sur le bord de la route. Le télétravail que CFDT et CFTC ont longuement défendu doit rester une option et non une obligation : personne ne doit se voir imposer le télétravail au motif qu’il n’y a plus de place disponible dans le bureau flexible. Et il ne doit pas être nécessaire de réserver les salles de réunions six mois à l’avance.

8) Questions diverses

a) Méthodes agiles

Malgré l’enthousiasme initial des collègues pour les méthodes agiles qui promettaient notamment des projets informatiques adaptés et rapidement visibles pour le réseau, le soufflet est malheureusement retombé : trop de réunion, trop de niveaux hiérarchiques, trop de lourdeurs administratives ont émoussé les bonnes volontés. Le recours aux prestataires pose également problème non seulement à cause de l’écart culturel ou générationnel, mais aussi parce que les contraintes imposées aux projets nuisent aux transferts de compétences. La direction disposant à présent d’un recul suffisant sur ces méthodes et leur acceptabilité, pourrait-elle nous faire un point sur leurs apports et leurs limites, ainsi que les mesures prises pour leur permettre de se déployer dans l’environnement DGFiP ?

b) Véhicules électriques

Concernant l’assistance, le verdissement des moyens de transport est nécessaire. Mais l’autonomie étriquée des véhicules électriques achetables, notamment la Renault Zoé, n’est pas compatible avec les compétences territoriales des Disi, sauf à passer des heures sur les parkings des Mac-Do pour recharger les batteries à des tarifs parfois prohibitifs. Encore la puissance des bornes de recharge n’est-elle pas toujours suffisante pour assurer l’opération dans un temps raisonnable. L’obligation de revenir à la direction chaque soir ne facilite évidemment pas les choses. Au-delà de l’autonomie, se pose le problème des options de ces véhicules. Les consignes nationales d’acheter les véhicules les moins chers possible mènent à des aberrations : pas de roue de secours, mais pas non plus de couvre-coffre pour masquer une cargaison de coûteux portables. Des règles générales ont-elles été édictées pour répondre à ces différentes problématiques ?

c) RGPD

Alors que notre administration se veut modèle concernant l’utilisation des données et que les équipes de développement ont parfois du mal à reproduire certains dysfonctionnements faute de pouvoir accéder aux données de production, la réception du message du ministre Guérini sur sa boîte de courriel privée a choqué plus d’un agent. L’alliance CFDT -CFTC souhaiterait savoir si, et dans quel cadre, des informaticiens de la DGFiP ont participé à l’extraction de ces données.

Il ne s’agit pas de basse politique, mais de cohérence, et de savoir jusqu’à quel point les agents peuvent faire confiance à leur administration en matière de protection des données. Certains ont déjà réagi en modifiant leurs informations de contact dans Sirhius, ce qui n’est sûrement pas ce dont nous pouvons avoir besoin en cas de crise.

d) IA à la DGFiP

La DGFiP vante dans les journaux la modernité de son système d’information et l’utilité des techniques d’intelligence artificielle pour détecter les fraudes. Des agents ont donc été surpris de constater que l’accès à l’outil ChatGPT était coupé depuis le réseau DGFiP alors que c’était a priori un moyen pour tout un chacun de se familiariser avec le sujet. Pouvons-nous savoir quelles sont les raisons qui ont présidé à cette décision ? Si la manipulation de cet outil vous semble présenter un risque, il serait utile pour tous les agents de le connaître et d’en tenir compte.

Certains services souhaitent l'utiliser dans le cadre de leurs fonctions pour optimiser du code, en utilisant moins de ressources serveur, pour la résolution de bugs, sans utiliser de données confidentielles mais uniquement des lignes de code génériques. Au même titre que Google, il peut également fournir des réponses rapides à certaines questions.

 

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