Sécurité et santé au travail : l’État-employeur a une responsabilité pénale

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Les employeurs ont l'obligation légale de garantir la sécurité et la santé physique et mentale des salariés, conformément à l'article L 4121-1 du code du travail, qui s’applique tant aux employeurs privés que publics.

C'est ce que la CFDT a rappelé dans son propos liminaire au Comité social d’administration centrale du 10 juillet 2025.

La CFDT tient à affirmer clairement que :

 

Non, l'atteinte des objectifs professionnels ne justifie pas tous les moyens et ne justifie en aucun cas des pratiques managériales pouvant s’apparenter à du harcèlement moral.

Le syndicat CFDT des personnels des administrations centrales économiques et financières franciliennes a obtenu la condamnation récemment d'un chef de service qui a été reconnu coupable de harcèlement moral sur son adjoint, lequel est décédé des suites des agissements qu'il avait subis au travail.

Dans cette affaire, le tribunal correctionnel a jugé que des propos dévalorisant méprisant et humiliant peuvent être retenus comme caractérisant une situation de harcèlement dès lors que l'auteur des faits a conscience du caractère déstabilisant, vexatoire ou risqué pour la santé de la victime. Il a également rappelé que le cadre de travail dont il est question en matière de harcèlement peut ainsi concerner les relations professionnelles interpersonnelles mais doit aussi être entendu comme l'organisation du travail, ses contenu et conditions. Ce cadre de travail concerne autant une collectivité qu'un individu.

Le harcèlement moral lorsqu’il est exercé par le ou les supérieurs hiérarchiques peut être managérial mais aussi institutionnel.

Si le Secrétariat général n’y prend pas garde des agissements dans les services et directions d’administration centrale seraient susceptibles d’être caractérisés comme du harcèlement institutionnel.

Conseil Économique et Social

Avis adopté le 11 avril 2001 relatif au Harcelement

Dans son avis adopté le 11 avril 2001, le Conseil Économique et Social identifiait, dans les typologies qu'il faisait du harcèlement moral, le harcèlement moral institutionnel, et le définissait alors comme participant « d'une stratégie de gestion de l'ensemble du personnel » susceptible de « prendre deux formes de persécution institutionnelle, l'une relevant d'une gestion d'ensemble et l'autre visant à obtenir le départ de certains salariés qui deviennent des cibles en fonction des besoins de l'entreprise : des cadres en doublon à l'occasion de fusion/absorption d'entreprise ou des travailleurs ayant atteint un certain âge. Dans les faits, ces deux cas se recoupent et se confondent parfois( ... )». Ce type de harcèlement moral est même décrit comme une sorte « de lutte pour la vie à l'intérieur de l'entreprise en mettant des salariés en concurrence sur les mêmes fonctions et en déstabilisant les collectifs de travail, l'objet étant finalement l'élimination de certains salariés par leurs collègues tout en obtenant des garanties quant à la docilité et au conformisme des "survivants" [ ... ] .» « Lorsqu'elles sont révélées, de telles stratégies frappent par leur ampleur : ceux qui les mettent en œuvre parviennent à obtenir la soumission de nombreux salariés, à obtenir le silence autour de ces méthodes et à faire, de manière simultanée, de nombreuses victimes ».

La commission nationale consultative des droits de l'homme a distingué, dans son avis du 29 juin 2000 portant sur le harcèlement moral dans les relations de travail, trois formes de harcèlement, dont celui à dimension institutionnelle :

  • un harcèlement institutionnel qui participe d'une stratégie de gestion de l'ensemble du personnel ;
  • un harcèlement professionnel organisé à l'encontre d'un ou plusieurs salariés, précisément désignés, destiné à contourner les procédures légales de licenciement ;
  • un harcèlement individuel, pratiqué dans un but purement gratuit de destruction d'autrui et de valorisation de son propre pouvoir.Le harcèlement moral managérial découle de modes ou pratiques de gestion du personnel provoquant une détresse psychologique. 

Le harcèlement moral institutionnel se distingue du harcèlement managérial en ce qu'il est susceptible de mettre en cause par son ampleur, au-delà de là personne de l'encadrant, la personne morale et ses dirigeants. Ainsi, le harcèlement moral institutionnel ne se définit pas tant comme un dépassement de l'exercice du pouvoir de direction (susceptible de caractériser le harcèlement managérial), que comme un abus du lien de subordination juridique liant le salarié à l'entreprise, au sein d'une communauté de travail.

En effet en administration centrale, une procédure de signalement a été mise en place, elle a le mérite d'exister certes, elle n’exonère toutefois pas l’employeur de sa responsabilité. Recueillir des signalements est une chose, les traiter en est une autre et, sur ce second point, la situation est pour le moins préoccupante.

La cellule de prévention de SRH3, en dépit de la très forte implication de la conseillère de prévention dont nous saluons le travail, semble trop souvent démunie dans ses moyens d’intervention et le Secrétariat général en retrait.

Les signalements s'accumulent parfois sur une même structure ou service, de même que les visites auprès de la médecine du travail se multiplient sans que le Secrétariat général ne prenne de mesures rapidement pour protéger les agents, ne serait-ce qu’à titre conservatoire. L’arrêt de travail est alors souvent la seule issue pour des agents qui n’en peuvent plus après des semaines voire des mois de dégradation de leurs conditions d’exercice du travail qu’ils ont pourtant signalée. Ce n’est pas acceptable.

La CFDT demande au secrétariat général de tout mettre en œuvre pour faire cesser des comportements inacceptables (propos dégradants, pressions et dégradation de l’organisation du travail et des conditions d’exercice du travail pour pousser les agents à partir, voire suppression pure et simple de leur poste alors qu’ils sont en arrêt maladie), les dénoncer et les sanctionner quel que soit le grade de celui qui se livre à de tels agissements. En outre, le départ de l’auteur des faits, lorsqu’il est nécessaire, n’est pas toujours suffisant, l’administration a la responsabilité vis-à-vis des victimes de s’assurer non seulement que les agissements ont cessé mais aussi que l’organisation et des conditions d’exercice du travail normales ont été durablement rétablies.

La CFDT attend du Secrétariat général qu’il prenne au sérieux les alertes que nous lui adressons, qu’il prenne ses responsabilités et traite les pratiques susceptibles d’être qualifiées de harcèlement, tant moral que sexuel, dans toutes leurs dimensions, interpersonnelles mais aussi d’organisation du travail et de ses conditions d’exercice.

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