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Obligation de déclaration des modalités d’occupation des biens : Services engorgés, contribuables en difficulté, agents exsangues… Et pas de réponses au niveau de la DG, auteur de ce fiasco

Publié le 27/06/2023 (mis à jour le 05/07/2023)

Le report du délai de la déclaration d’occupation des biens immobiliers au 31 juillet 2023 annoncé le 23 juin 2023 – 7 jour avant la date butoir –  se veut une réponse aux difficultés des propriétaires de biens et à la situation extrêmement dégradée rencontrée dans les SIP, les centres de contact et les services fonciers, du fait de cette nouvelle obligation mise en place au 1er janvier 2023. Alors que plus de 40% des propriétaires concernés ne s'étaient pas manifestés, le fiasco du tout « démat' » oblige à interroger le gouvernement : la DGFIP doit-elle vivre ses évolutions sans tenir compte des citoyens, au risque d'aggraver la défiance des Français vis-à-vis de l'État, et au détriment de ses agents ?

Depuis son ouverture le 2 août 2021, le service en ligne « Gérer mes biens immobiliers » a conduit à une augmentation de la sollicitation des centres de contacts, des services fonciers et des services des impôts des particuliers par les contribuables. La difficulté avait été largement identifiée et nous avions pu indiquer à la direction générale (DG) lors des groupes de travail de fin 2021 et de l’année 2022 que ces interrogations – relative en général à la propriété, la nature ou la consistance des biens – mettaient les services en tension dans un contexte déjà fortement dégradé par les suppressions emplois, les restructurations et l’évolution du périmètre des missions ainsi que des évolutions applicatives nombreuses et mal maîtrisées, pour ne pas dire calamiteuses.

Avec la mise en place au 1er janvier 2023 de l’obligation de déclaration des modalités d’occupation des biens dont disposent les propriétaires, nous avions alerté la DG sur le risque majeur d’explosion du nombre de demandes d’informations et d’interrogations des services par les contribuables. Nous avions également alerté quant aux difficultés majeures que rencontreraient les très nombreux propriétaires les moins à l’aise avec l’outil numérique alors que la procédure déclarative était annoncée intégralement dématérialisée.

Que nenni, la DG n’a aucunement entendu les représentants des personnels et a mis en œuvre le dispositif au 1er janvier 2023 sans anticiper le besoin de moyens humains supplémentaires, sans indiquer une procédure spécifique claire pour les usagers ne pouvant réaliser leurs déclarations en ligne et sans anticiper les nombreuses difficultés particulières qui avaient été par ailleurs dénoncées comme la situation spécifique des sociétés propriétaires de locaux d’habitation et en particulier certaines sociétés civiles immobilières peu habituées au système déclaratif en ligne.

Non contente de ne pas prendre la mesure de la difficulté à venir, évaluant mal la « bosse », la DG s’enorgueillissait de son service GMBI et poursuivait, concomitamment avec la campagne déclarative d’impôt sur les revenus, une campagne de communication pour l’obligation de déclaration d’occupation… Les services des impôts des particuliers, et les centres de contacts étant les principaux acteurs du suivi de l’obligation déclarative d’occupation et de la déclaration de revenus, on ne pouvait guère douter de l’explosion à venir. En outre les services fonciers eux aussi se retrouvaient fortement impactés par un afflux de contribuables s’interrogeant plus que jamais sur les biens dont ils apparaissaient propriétaires dans GMBI, leur nature et leur consistance.

La DG a donc réussi avec son nouveau dispositif et son manque de préparation à noyer les services sous les appels et les courriels/e-contacts, mais aussi à saturer les accueils physiques. A ce stade les SIP, les services fonciers et les centres de contacts sont assaillis de demandes et des dizaines de milliers de courriels sont à traiter avec des moyens totalement insuffisants. Les services des impôts des entreprises (SIE) sont également fortement impactés avec des professionnels qui s’interrogent et sont souvent fortement irrités. Le cas des SCI est emblématique avec la nécessité pour certaines de créer leur compte professionnel, puis d'adhérer à GMBI avant d’y accéder pour remplir leur obligation, avec des difficultés techniques ou des problèmes de compréhension qui conduisent à de fortes sollicitations des services et l’énervement des contribuables. Les accueils débordent, les services sont engorgés, les agents s’épuisent et n’en peuvent plus.

Pis-aller, la DG a annoncé le 23 juin 2023, par voie de communiqué de presse, le report de l’obligation déclarative au 31 juillet 2023… report de délai qu’on peut d’ores et déjà annoncer comme bien trop court. Elle nous précise à nouveau qu’en cette première année d’obligation déclarative il sera fait preuve de mansuétude envers les contribuables qui n’auront pu accomplir leur obligation à temps, mais parallèlement communique fermement sur les sanctions prévues par la loi et n’a cessé d’indiquer que la tolérance s’appliquerait au cas par cas. Elle nous indique que des vacataires seront recrutés... Mais encore faudra-t-il les trouver, puis les former – avant le 31 juillet – afin qu’ils puissent réellement aider les agents des SIP et services fonciers à écoper. Des directions commencent à distribuer des formulaires papier dans les files d’attentes pour désengorger les accueils mais aucune consigne nationale claire n’a encore été donnée.

Face à l’afflux de demandes et aux problématiques pérennes que pose la nouvelle obligation déclarative ainsi que les autres évolutions en cours dans les SIP (cf. notre compte-rendu sur l’avenir des SIP) et les services fonciers (Foncier innovant qui accroit la charge des service, la bascule de LASCOT vers SURF encore très problématique, le transfert de la taxe d’aménagement sans applicatif fonctionnel, le système de dématérialisation des déclarations foncières encore à quai et techniquement problématique, les contentieux à venir... ), un renforcement durable est nécessaire car contrairement à ce qu’avance la DG lorsqu’elle fait la promotion de ses développements applicatifs auprès de l’exécutif, du FTAP (Fonds pour la transformation de l'action publique), des parlementaires ou de la presse, les gains de productivité ne sont pas là et les suppressions d’emplois qu’elle a anticipées conduisent les agents exerçant dans ces services vers le précipice.

Dans ce contexte la CFDT Finances publiques demande le report du délai au-delà du 31 juillet, une procédure claire pour les contribuables en rupture avec l’outil numérique et le renforcement immédiat et pérenne des SIP, services fonciers et centre de contacts.

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