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Action Publique 2022 : La Cour des Comptes prend de vitesse le Gouvernement !

Publié le 26/06/2018

On attendait depuis fin mars, on attend toujours d'ailleurs, même si certaines informations nous font désormais douter d'une véritable publication, le rapport du Comité, chargé par le Gouvernement de faire des propositions sur une refonte d'ampleur des missions de service public, exercées notamment par les personnels de la DGFiP.

La Cour des Comptes, elle, a tiré profit de ce retard pour prendre tout le monde de vitesse ! Son rapport, publié le 20 juin, à défaut d’autres qualités, aura au moins le mérite de confirmer (mais est-ce vraiment un scoop?) les propos tenus par le Ministre de l'Action et des Comptes publics, en particulier, devant les parlementaires, ou bien les pistes de réflexion évoquées devant les organisations syndicales par le Directeur Général des Finances publiques.

 

 

Dès cette publication, la CFDT Finances publiques s’est empressée de prendre connaissance et d'analyser les 17 recommandations de la Cour présentées en conclusion de ce rapport.

Sans réelle surprise, nous y retrouvons plusieurs idées exprimées par le directeur général lors des réunions qu’il avait présidées ces derniers mois. En particulier, la 1ère recommandation qui demande à la DGFiP de se doter d’une stratégie de transformation à moyen terme à mettre en œuvre dans le cadre d’une convention d’objectifs et de moyens pluriannuelle.

Faut-il y voir le retour du contrat pluriannuel de performance et de sa prime d’intéressement collectif ? Nous le saurons prochainement car le Gouvernement est en pleine période de préparation budgétaire. Malgré tout, il est permis d’en douter et il est peu probable que les personnels soient gagnants. En effet, il est significatif de ne pas retrouver le terme de contrat, désormais remplacé par celui de convention. Exit donc le volet prime de performance pour les personnels ! En clair, la Cour demande à la DGFiP de programmer des transformations, donc de nouveaux efforts aux personnels, sans un quelconque retour pour la « récompense » des efforts accomplis. Ils ne devront alors « se satisfaire » que d’une plus grande visibilité sur les actions menées par la direction générale. Or, celles-ci iront toutes dans le même sens : poursuite des regroupements de services et des suppressions d’emplois avec, en plus, cette fois, des transformations plus profondes au sein de la DGFiP. Parmi celles-ci, concernant les cadres, c’est bien vers une remise en question des parcours de carrière à laquelle nous allons assister dans un avenir très proche.

Quels impacts pour les cadres ?

Certaines recommandations sont explicites :

  • Mettre en œuvre un plan de resserrement du réseau des SIE et des SIP à cinq ans comportant des projets d’implantations mutualisées avec d’autres entités publiques ;
  • Expérimenter le modèle de l’agence comptable auprès des collectivités territoriales volontaires ;
  • Fermer les trésoreries dont les effectifs ne permettant pas d’assurer un service continu et de qualité ;
  • Confier aux DRFiP la mission d’animation du réseau et supprimer les DIDG ;
  • Transformer à un horizon de trois ans les 354 services de publicité foncière en un service à compétence nationale ;
  • Concentrer l’assignation des dépenses sur un nombre limité de postes (DRFiP ou postes nationaux spécialisés).

Et ce n’est pas la recommandation d’organiser le transfert à la DGFiP des missions comptables exercées par la Douane qui pourra venir limiter les impacts liés aux autres recommandations. En effet, combien de transferts de mission entre administrations se sont finalement soldés par aucun transfert d’emplois correspondant à la charge transférée ?

Les impacts de ces transformations seront très importants et il faut s’attendre à une (R)évolution inéluctable de la carrière comptable d’ici 5 ans.

Le regroupement massif de postes comptables va augmenter l’effectif moyen des postes avec, en corollaire, un reclassement des postes en catégorie C1 gérés par des CSC, ce qui limitera encore plus l’accès des inspecteurs divisionnaires et principaux, ne parlons pas des inspecteurs, à l’exercice du métier de comptable.

L’assignation des dépenses de l’Etat concentrée sur un nombre limité de postes (13 DRFiP et quelques Postes comptables nationaux spécialisés) remet en cause à terme les attributions de comptable supérieur de l’Etat au niveau départemental.

Si les n°1 départementaux perdent tous l’assignation des dépenses, il sera plus facile de mettre en œuvre des directions supra départementales qui n’auront alors que la partie recette de l’Etat à centraliser et à comptabiliser.

Il faut d’ailleurs rappeler que dans un rapport antérieur de la Cour, celle-ci estimait déjà qu’il fallait réduire le nombre de comptes de gestion de l’Etat à 40 environ au lieu des 100 comptes de gestion actuels. Conséquence directe : 60 n°1 perdraient alors le statut de comptable supérieur de l’Etat.

Une autre recommandation est aussi source de suppression d’emplois de comptables dans le secteur SPL avec l’expérimentation d’agences comptables qui concerneront essentiellement des grandes collectivités territoriales. Conséquence à terme : des emplois de CSC seront alors supprimés.

Tous ces impacts seront déterminants et dévastateurs dans l’évolution des carrières des cadres de la DGFiP qui sont actuellement affectés dans près de 4000 postes comptables.

La Cour recommande enfin d’identifier les compétences dont la DGFiP aura besoin à l’horizon de 10 ans et en tirer les conséquences en matière de recrutement et de formation.

Pour la CFDT Finances publiques, la nécessité de mettre en place une véritable GPEEC ne peut que contribuer à améliorer une situation présentant un réel déséquilibre entre les emplois d’encadrement nécessaires et les cadres effectivement en fonction sur ces emplois.

Il est urgent de remédier à cette situation mais la DGFiP n’a que trop tarder à se préoccuper de la situation des cadres.

La CFDT Finances publiques avait alerté la DG sur les conséquences du Big bang que représentait l’ouverture des filières en 2015 sans avoir réellement anticipé cette évolution du périmètre en matière de formation d’adaptation à l’emploi. Combien de comptables rencontrent maintenant des difficultés, soit en ayant changé eux-mêmes de filière, soit en ayant un effectif d’agents n’ayant plus la technicité suffisante requise, quand ce n'est pas les deux en même temps ?

Enfin, sans véritable GPEEC, combien de cadres se retrouvent dorénavant sur des emplois ne correspondant plus à leur grade ? Ici, des AFiPA en surnombre ou sous employés, là, des IP sans aucune perspective de carrière, ou devant assumer des fonctions normalement dévolues à des inspecteurs, ailleurs, des Idiv devant de plus de plus se faire à l’idée qu’ils ne seront plus que des adjoints jusqu’à la retraite !

Il y a urgence pour la DGFiP à agir vis-à-vis de ses cadres ! 

La CFDT Finances publiques, bien évidemment, ne partage pas la vision purement comptable et budgétaire de la Cour des comptes, quand elle en rajoute par rapport aux orientations déjà connues d’AP2022, mais elle ne peut que constater que sans une véritable gestion prévisionnelle des emplois des effectifs et des compétences, la DGFiP va au-devant des plus grandes difficultés.

Sans cette prise de conscience, et sans véritable doctrine d’emploi de ses cadres, la DGFiP ne fera qu’aggraver encore davantage la perte de repères et la démotivation de son encadrement.

Face à l'urgence de la situation, à la nécessité de trouver de vraies bonnes réponses, la CFDT Finances publiques jouera tout son rôle d'alerte et de proposition.

 

 

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