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Budget 2018 : des moyens réduits, une concertation expédiée

Publié le 13/10/2017

Gérald Darmanin et Bruno Le Maire ont présidé le Comité technique ministériel (CTM) du 11 octobre 2017. Pour cause de Conseil de Défense, à 9h, les ministres ont tenu un CTM express de 35 minutes. Les organisations syndicales n'ont pas pu échanger avec les ministres et ont décidé, devant tant de mépris, de quitter la salle. Cette dépêche fait le point sur l'essentiel : une annonce forte du ministre Le Maire sur la DGCCRF, le PLF 2018 et l’amiante.

La très courte réunion des ministres 

Les suppressions d'emplois continuent

Le ministre de l'Economie et des Finances a affirmé "le caractère régalien des missions des ministères économiques et financiers, ministères stratégiques pour la nation et l'intérêt général"...mais pas prioritaires en ce qui concerne les missions de la Douane.

Il a remercié les agents des Caraïbes qui vivent la reconstruction des services publics et indique avoir apporté très rapidement une aide pécuniaire (voir la dépêche Irma : la CFDT Finances interpelle les Ministères).

Il a indiqué avoir pris en compte la journée de grève et de manifestation de la veille (27,94% de grévistes) alors que le ministre de l'Action et des Comptes publics a joué la provocation en disant avoir "vu les agents qui étaient en grève...et ceux qui ne l'étaient pas".

Le ministre de l'Economie et des Finances a brossé le contexte budgétaire du quinquennat avec une baisse de :

  • 5 points de dette publique, 
  • 3 points de dépenses publiques
  • 1 point de prélèvements obligatoires.

Il a annoncé un budget "quasi stable" avec des crédits de fonctionnement en hausse de 0,9% et une masse salariale en baisse de 0,8%. Avec 198  suppressions d'emplois, le ministre revendique un "taux d'effort" identique à 2017 (1,5%) et 13137 ETP au final.

Des engagements en faveur de la DGCCRF

Le ministre de l'Economie et des Finances a dit avec force "qu'il y aura des changements" et que sa conviction n'avait pas varié. Il a déclaré qu'il portera au plus haut niveau "le besoin de retrouver de la verticalité dans cette direction stratégique". Il ne garantit pas l'issue de l'arbitrage mais a assuré les représentants des personnels de sa volonté de voir cette direction retrouver sa cohérence.

La DGCCRF a été méprisée dans ses missions, effacée dans son autorité et sa cohésion. Pour la CFDT Finances, ces engagements du ministre faits devants les représentants des personnels en CTM doivent se traduire dans les faits. Les agents de la DGCCRF ont suffisamment attendu une solution à l'écartèlement de leur direction entre deux inter ministérialités. La crédibilité de la parole du ministre dépend à présent du résultat de l'arbitrage qui devrait être rendu mi 2018. La CFDT continuera ses actions afin d'arriver à une solution favorable aux agents et à l'exercice de leurs missions. 

Le PLF mode TGV 

Le ministre de l'Action et des Comptes publics a présenté le PLF à toute vitesse. En résumé, pour le ministre, c'est mieux avec moins. 

Amiante

La CFDT Finances avait interpellé le ministre dès sa première rencontre sur le sujet de l'amiante dans les MEF et plus particulièrement de la situation des agents de l'ex Tripode à Nantes. La mission IGAS qui examine la demande de classement en site amianté devrait rendre ses conclusion début 2018. Il souhaite associer tous les acteurs c'est-à-dire les ministres de la Santé et du Travail.

En raison du départ précipité du ministre, la CFDT Finances n'a pas pu lui répondre que les agents et leurs représentants trouvent le temps long et qu'elle veut une date butoir de conclusion de ce dossier. 

Egalité professionnelle

Le ministre semble intéressé par ce sujet, mais surtout par l'obtention du label diversité/égalité professionnelle. Pour la CFDT Finances, les avancées pour les agents ne seront réelles que si toutes les parties s'engagent dans une négociation et, démocratie sociale oblige, dans le cadre d'un accord majoritaire. 

Dialogue social

Le ministre a dit être très attaché au dialogue social. Pour preuve, il a rencontré trente fois les organisations syndicales. 

La CFDT Finances n'a pas eu le temps de lui répondre que ce n'est ni le nombre ni la durée qui fait la qualité du dialogue social, mais les résultats obtenus. 

L'analyse de la CFDT Finances

La mécanique des suppressions d'emplois à Bercy

Les suppressions d'emplois inscrites au Projet de loi de finances (PLF)  2018 s'élèvent à :

  • 1600 à la DGFiP,
  • 107 en Centrale,
  • 82 à l’INSEE
  • 45 à la DGCCRF.

Les crédits de personnel (titre 2) baissent de:

  • -85 132 303 € à la DGFiP,
  • -7 526 921 € au Secrétariat général,

et augmentent à la Douane (22 895 946 €).

Les années précédentes, ces suppressions d'emplois étaient officiellement basées sur des gains de productivité. Pour la CFDT Finances, non seulement ils n'étaient pas avérés, et, quand ils pouvaient l'être, le "retour sur investissement" était largement anticipé par l'administration.

Aujourd'hui, les ministères ne peuvent plus faire le lien entre les gains de productivité et les suppressions d'emplois puisque le taux de suppressions d'emplois est de 1,5% pour quasiment toutes les directions. Le plan de suppressions d'emplois est bien mis en œuvre dans les ministères pour des raisons strictement budgétaires.

Depuis une quinzaine d’année, plus de 30000 emplois ont été supprimés ! Cet effort continu de suppressions d'emplois, de réorganisations, de restructurations sur une période aussi longue est inédit et a des conséquences sur la qualité des services publics et sur les agents. Bercy est toujours considéré comme le réservoir des suppressions d’emplois de la Fonction publique d’Etat. Pour la CFDT Finances, ce ne sont plus les considérations budgétaires mais les besoins sociétaux et les politiques publiques qui doivent fonder les moyens que l’Etat affecte aux services.

A la DGFiP, ces suppressions d'emplois s'ajoutent à celles des années précédentes et ont un effet cumulatif qui pèse sur les missions et les conditions de travail des agents. Le détail des 1600 suppressions d'emplois en ETP par catégorie :

  • A+ : -  126
  • A :   -  635
  • B :   -1625
  • C :  + 786

La Douane fait exception avec la création de 200 emplois en 2018, répartis entre les opérations commerciales et la surveillance. Le contexte particulier du renforcement du contrôle des personnes aux frontières et du Brexit expliquent ces créations d'emplois. Pour autant, nous sommes encore loin des 1000 créations d'emplois à la Douane annoncées par le gouvernement précédent (+250 en 2017).

Devant l'urgence, l'administration des Douane envisage des recrutements de contractuels sans concours à hauteur de 16% des recrutements 2018 (118 sur 740). La CFDT Finances dénonce cette dérive gestionnaire. La CFDT Finances veut une concertation sur la gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences (GPEEC).

L'adaptation des structures se traduit par des réorganisations à la DGFiP et la centralisation des pôles de compétences à la douane. Elle montre ses limites avec la perte de savoir-faire.

L'INSEE connaît 82 supressions d'emplois en 2018 (97 en 2017). Elles s'ajoutent aux précédentes et, après l'os, Bercy attaque la moelle. L'INSEE ne devrait pas connaître de réorganisation de services en 2018.

La DGCCRF n'a pas connu de suppressions d'emplois depuis 2013 du fait de sa taille critique. Ces 45 suppressions d'emplois sont un choc dans une administration dont l'avenir des missions et des personnels n'est pas encore arrêté.

Le ministre de l'Action et des Comptes publics n'a pas pu être interrogé sur la garantie individuelle de pouvoir d'achat (GIPA) pourtant chiffrée dans la PLF 2018 à 24 493€ pour 625 agents bénéficiaires à la DGFiP. La CFDT Finances attend donc une annonce positive lors du rendez-vous salarial du 16 octobre prochain.

A la DGFiP, le passage au 9ème échelon de l'ex échelle 6 de la catégorie C est évalué à 2,6 millions d'euros en année pleine pour 1477 agents bénéficiaires.

L'impact du jour de carence à la DGFiP est évalué à 5,8 millions d'euros. La CFDT Finances dénonce cette mesure stigmatisante  qui aura des conséquences sur la santé des personnels. A la place, l'employeur public serait bien inspiré d'ouvrir des négociations pour une protection sociale complémentaire financée à 50% par l'employeur.

Le coût total du projet de prélèvement à la source est évalué à 171,6 M€. Son report aura comme conséquence une augmentation de ce montant.

Le PLF 2018 est aussi l'occasion d'apprécier l'évolution du coût des applicaitons informatiques : 

  • SIRHIUS a dépassé le budget initial de 72% (130 M€) pour 300 suppressions d'emplois à terme et un gain de masse salariale de 220 M€ sur 10 ans à la DGFiP
  • L’application PAYSAGE relative aux payes a dépassé le budget initial de plus de 100%
  • L'application ENSAP  (espace numérique sécurisé de l'agent public de l'Etat) avec un coût de près de 21 M€ a dépassé le budget initial de plus de 32%.Le gain annuel attendu est estimé à 21,8 M€ dans le PLF 2018.

Pour la CFDT FInances, ce PLF sous contrainte budgétaire inscrit l'exercice de revue des missions de CAP 2022 dans un exercice très contraint. Les perspectives 2019 et 2020 seront encore plus dégradées, comme en témoigne le budget de la DGFiP :

  • 2018 : 8 134 000 000 €
  • 2019 : 8 074 000 000€
  • 2020 : 8 002 000 000€

soit une baisse de -1,6%.