(D)évaluer pour (Dé)motiver ou comment la DGFIP (dé)valorise ses agents

Publié le 27/03/2024

Le groupe de travail du 20 mars a été l’occasion de faire un retour d’expérience (RETEX) sur la campagne d'évaluation professionnelle 2023. Nous y avons porté nos revendications et avons obtenu des avancées concrètes pour rendre à l'évaluation professionnelle sa véritable finalité : en faire un outil de motivation plutôt que de démotivation.

Cette campagne a été marquée, non seulement par un changement d’outil mais aussi par un changement de philosophie. Ces changements ont engendré toute une série de disparités dans la rédaction des comptes-rendus d’entretien professionnel (CREP) ce qui a nourri l’insatisfaction des agents, si tant est qu’ils aient eu besoin de ce prétexte pour manifester leur ras-le-bol face à une administration qui semble rester sourde à leurs difficultés quotidiennes. De fait, nombre d’entre eux ont saisi les commissions administratives paritaires (CAP) pour contester leur CREP sans obtenir, pour une majorité, les résultats escomptés.

 

 

L’évaluation professionnelle, centre de la carrière d’un agent

Les Lignes Directrices de Gestion (LDG) élaborées par la DGFIP en 2021 ont placé l’évaluation professionnelle au centre de la carrière des agents.

L’évaluation professionnelle a désormais des conséquences directes sur les promotions avec la cotation du profil croix du tableau synoptique des agents de catégorie C et B. Elle impacte fortement la mobilité des agents avec l’augmentation des postes au choix notamment pour les agents de catégorie A. Elle sera demain l’unique outil d’attribution de la prime à la performance.

 

Ainsi cet outil construit subjectivement devient l’élément objectif déterminant la carrière d’un agent.

 

Retour sur la campagne 2023 (gestion 2022)

La dernière campagne d’évaluation professionnelle a pu être compliquée pour certains agents qui ont subi les nouvelles règles édictées par la DGAFP (Direction Générale de l’Administration et de la Fonction publique). Ces directives ont été appliquées arbitrairement et au bon vouloir des directeurs locaux ou chefs de service.

Certains agents ont vu leur profil croix se dégrader considérablement quand d’autres, non préparés, ont dû apprendre à rédiger des évaluations professionnelles au prétexte qu’ils seraient encadrants, positionnement qui parfois ne leur a jamais été reconnu au sein de l’organisation du service.

Il a aussi pu être constaté un cadrage directif par le chef de service - qui est aussi l'autorité hiérarchique - envers l'évaluateur, avant la tenue de l’entretien individuel. Cette pratique remet en cause l’objectivité de l’évaluation professionnelle et surtout le rôle de médiateur de l’autorité hiérarchique. Comment espérer un arbitrage objectif du chef de service - autorité hiérarchique - alors qu’il a donné ses ordres précis aux évaluateurs sur chaque évaluation individuelle ?

C’est pourquoi, l’alliance CFDT-CFTC a fait des propositions concrètes (lire notre déclaration liminaire) pour rendre à l’évaluation professionnelle une partie de son objectif : en faire un outil de motivation et non pas un outil de démotivation.

Nous avons obtenu des avancées.

Concernant les agents évalués

  • Rappeler en début d’entretien les règles des LDG en matière d'avancement de grade et de promotion de corps (cotation des items du tableau synoptique et nécessité de l’absence de réserve dans les évaluations) : trop d’agents ignorent encore les subtilités des LDG et leur impact sur leur carrière

  • Permettre à l’agent d’avoir un entretien avec son ancien responsable si cela s’avère nécessaire pour avoir des éclaircissements sur les points qui y sont mentionnés dans la fiche préparatoire

  • Proposer un entretien dans un lieu qui ne soit pas le bureau du supérieur hiérarchique pour faciliter la fluidité des échanges et redonner à l’entretien son rôle d’échange

Concernant les agents évaluateurs

  • Organiser des formations pour les N+1 qui ne prennent pas la forme d’un webinaire mais d’une journée en présentiel, la rédaction d’une évaluation de s’improvisant pas

  • Un nouveau rappel sera fait à toutes les directions locales ou spécialisées pour ne pas exclure par principe les cadres « non encadrants » (vérificateurs, huissiers, experts, chargés de mission, etc.) de l’évaluation des compétences managériales

Concernant les prochains retours d’expérience

  • Présentation des statistiques par grade pour les A dans la mesure où les doctrines d’emploi sont différentes

 

Certains points devront être expertisés 

  • Adaptation des fiches préparatoires au nouvel outil ESTEVE

  • Possibilité de faire un recours contre un entretien prospectif

 

A la veille de la mise en place de la prime au mérite, devenue prime à la performance, l’alliance CFDT-CFTC s’inquiète fortement des disparités constatées mais également des libertés que pourraient s’octroyer certains évaluateurs et/ou autorités hiérarchiques.

Ce RETEX a prouvé une chose de manière incontestable : les inégalités de traitement entre directions, entre services d’une même direction et la subjectivité importante des entretiens professionnels.

Or les CREP impactent déjà les chances de promotion et de mutation. Et sûrement demain, le montant qui figurera en bas de leur fiche de paie avec comme conséquence une démotivation plus renforcée. Si la DGFIP veut lutter contre la démission silencieuse, elle va devoir s’y prendre autrement.

TÉLÉCHARGEMENT DE FICHIERS