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La DGFiP, réservoir épuisé des suppressions d’emplois

Publié le 05/09/2019 (mis à jour le 10/09/2019)

Le 3 septembre 2019, le ministre de l’Action et des Comptes publics (MACP) a annoncé 5 775 suppressions d’emplois sur l’ensemble du ministère (cf. dépêche). La DGFiP en supportera la majeure partie (1 500 ETP en 2020, 1 800 en 2021, et 1 600 en 2022 d'après le courrier du ministre du 4 septembre, lequel se satisfait de moindre suppression que ces prédécesseurs... sauf qu'on reste dans le même ordre de grandeur rapporté aux nombre d'agents).

La campagne de communication en faveur de la réforme est lancée ! Presse et plus récemment courrier « rassurant » à l'ensemble des agents, le ministre tente de valoriser son action...

Est-ce le poids des habitudes, ou sur la base d’éléments biaisés que Gérald Darmanin effectue un prélèvement massif sur les effectifs de la DGFiP à l’instar de ses prédécesseurs. Après l’annonce de près de 6 000 suppressions d’emplois, principalement supportées par la DGFiP, les mêmes ritournelles sont avancées pour justifier ces suppressions : nouvelles technologies, gains de productivité liés à la dématérialisation, etc.Le ministre y a ajouté des gains réels ou supposés des réformes en cours ou à venir (prélèvement à la source, taxe d’habitation, ISF remplacé par l’IFI, fouille de données pour le contrôle fiscal, etc.).

 

Sous couvert de l’argumentaire éculé de « modernité », et sans crainte des approximations, tout arbitrage à la baisse trouve sa justification. Lors de son audience devant la commission des Finances de l’assemblée nationale le 28 mai dernier, le ministre de l’action et des comptes publics a même affirmé que la direction générale des Finances publiques (DGFiP) comptait pas moins de 117 000 agents (quelques instants après avoir avancé qu'elle en comptait plus de 110 000…). Des données incertaines présentées aux parlementaires alors que la lecture du rapport annuel d’activité de la DGFiP confirme bien que seuls 102 607 agents titulaires y travaillent et que le projet de loi de règlement du budget 2018 indique 100 859 équivalents temps plein au 31/12/2018...

 

En fait, l’obsession de nos gouvernants à réduire les moyens de la DGFiP est une constante. Nous assistons à un véritable effondrement depuis de nombreuses années. Et nul ne s’est réellement préoccupé de l’impact des réductions d’emplois sur les usagers, l’État et ses moyens d’action, le tissu économique, les conditions d’exercice des agents, etc. Mais aussi l’impact direct ou indirect sur la fraude fiscale, sur le recouvrement, sur la facilitation à la fraude documentaire, sur la qualité de la donnée patrimoniale et fiscale, etc.).

 

Etablissons un bilan de ces années d’écrémage : à cette fin, on peut s’appuyer sur les rapports annuels de la DGFiP, mais aussi ceux émis depuis 2003 par les deux anciennes directions fusionnées, DGI (impôts) et DGCP (comptabilité publique). Les données figurant dans les annexes aux projets de loi de règlement budgétaire depuis 2009 sont également instructifs (cf. infra, éléments détaillés en pièce jointe). En 2003, la DGI et la DGCP regroupaient 139 047 agents titulaires. En 2008, année de la fusion, ce nombre était tombé à 126 586. 10 ans après, la DGFiP ne dispose plus que de 102 607 agents pour exercer ses missions.  On arrive à une baisse de l'effectif de 26,21 % en 15 ans. En « équivalents temps plein » (ETP), la DGFiP a perdu 21 690 ETP depuis 2009, soit 17,70 % de temps agent en moins.la DGFiP ne dispose plus que de 102 607 agents pour exercer ses missions, soit une baisse de 26,21 % en 15 ans.

Or, contrairement à ce qu’arguent certains décideurs, les gains de productivité n’ont aucunement permis de compenser cette saignée. Le précédent directeur général, Bruno PARENT, admettait lui-même que les suppressions d’emploi se faisaient maintenant sans gain de productivité (NDLR : depuis 2015).

 

Il convient d’indiquer que si la catégorie la plus touchée par cette saignée est celle des agents administratifs, le corps des contrôleurs est en diminution systématique depuis 2013, suivie dès 2014 par celui des inspecteurs. Dans le même temps, les décideurs « zappent » le fait que le nombre d’habitants, de contribuables, d’occurrences foncières, de dossiers professionnels progressent ou, à tout le moins, ne diminuent pas. De facto, les ratios de couverture sont passés au rouge. Corrélativement, tous les usagers en pâtissent : horaires d’ouverture réduits, conditions d’accueil du public dégradées, temps de réponse rallongés aux courriels ou écrits, appels téléphoniques sans réponse, etc. Des situations génératrices de tensions pour les contribuables comme pour les personnels. Côté contrôle fiscal, l’impact s’est traduit dans les résultats dont on change dorénavant les curseurs pour mesurer on ne sait plus trop quoi ! Performante culture de la performance…

 

En attendant, le démantèlement se poursuit avec le projet de fermeture de plus de 1 000 trésoreries, soit les 2/3 du réseau. Comble d’ironie, cela se fait sous couvert de se rapprocher des citoyens « périphériques ». S’y ajoute, l’accélération des transferts de mission : recherche d’un prestataire de service rémunéré pour encaisser et décaisser le numéraire ; transfert de la mission topographique en cours ; transfert de charge des services de publicité foncière vers les notaires ; recherche de transfert de mission vers les collectivités locales avec la récente expérimentation des agences comptables, etc. Des transferts ressentis comme autant de gifles pour beaucoup d’agents après des années de travail consciencieux et loyal.

 

 

La CFDT Finances publiques condamne cette vision dogmatique qui conduit à réduire les effectifs depuis plus de 15 ans, à nuire à la qualité du service public et à éloigner l’État de certains citoyens.

 

La CFDT condamne le choix d’abandonner et de transférer des missions conduisant à ces suppressions d’emplois.

 

Pour une meilleure qualité de service public et une proximité retrouvée, la CFDT demande des recrutements à la hauteur des enjeux de la reconquête des territoires, demande des moyens en matière de lutte contre la fraude, en matière de recouvrement, mais aussi pour permettre d’assurer la qualité de la donnée fiscale, patrimoniale et foncière.

 

La CFDT réclame une politique d’emploi prévisionnelle intégrant les besoins en nouveaux métiers et expertises. La CFDT exige une gestion RH tenant compte des compétences et des acquis des agents, et une politique indemnitaire répondant mieux aux charges de travail et à la technicité.

 

Références :

 

L’audition devant la commission des finances de l’AN :

Les rapports d’activité de la DGFiP :

Les projets de loi de règlement du budget et leurs annexes sont disponibles à l'adresse suivante :

Vous trouverez en pièce jointe un tableau récapitulatif de l'évolution des effectifs de la DGFiP. Ce tableau a été réalisé par la CFDT Finances publiques sur la base des données figurant dans les rapports d'activité de la DGFiP et des annexes « rapport annuel de performance - Gestion finances publiques ressources humaines » aux projets de loi de règlement du budget.

 

 

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