NRP* - 407 villes candidates à accueillir des services DGFiP "démétropolisés"

Publié le 23/12/2019

Les communes aiment la DGFiP …et son personnel ! Le comité chargé de sélectionner parmi les villes candidates à l'installation de services des Finances publiques « démétropolisés » (d'Ile-de-France et des grandes métropoles) celles qui seront les « heureuses élues », s'est réuni le 19 décembre. 407 communes et communautés de communes ont manifesté leur intérêt. Mais reste une inconnue de taille : quels services et quels agents sont potentiellement concernés ?

La liste des 407 villes qui se sont portées candidates à « la mise au vert » d'agents des Finances publiques travaillant dans les grandes métropoles et en Ile-de-France a été dévoilée le 19 décembre aux représentants du personnel (CFDT-CFTC et Solidaires. FO excusée) à l’occasion d’une réunion ad hoc (comité de sélection) dirigée par le DG Jérôme Fournel.

Depuis l’annonce au cours de l’été 2018 du projet de « géographie revisitée » – devenu depuis NRP ou « nouveau réseau de proximité » – , les inquiétudes des agents potentiellement visés par des délocalisations n’ont fait que croître au gré de rumeurs… loin d’être toutes venues « d’en bas ». 

Reste aujourd'hui une inconnue bien plus essentielle pour les agents : quels services vont être concernés par ces délocalisations ? Plus que la liste des villes candidates (confidentielle en l'état), – laquelle va de facto fortement diminuer au grè des comités à venir –, ce sont les services et agents visés qui intéressent la communauté DGFiP.

NRP (*) : Nouveau ou Nano Réseau de Proximité ?

Le NRP apparaît comme une bien curieuse politique d’aménagement du territoire conduisant à fermer des services impôts des entreprises et des particuliers, des services de publicité foncières, des trésoreries et autres sites en symbiose avec les activités locales, alors que dans le même temps, le NRP, dans son volet « démétropo », vise à ramener quelques maigres bataillons, disséminées à l’encan aux quatres coins du territoire, lesquels ne participeront à l’économie locale que par la seule présence de consommateurs supplémentaires...

Où est la « vision dynamique » chère à nos décideurs qui n’ont à la bouche que « mouvement », « synergies » ou « effets réseaux » dans cette réduction du maillage de la DGFiP et ce saupoudrage « dé-métropolisateur » concomitant ?

Il y a aussi un hic que l'alliance CFDT-CFTC Finances publiques a de nouveau dénoncé lors du CTR du 20 décembre (comité technique de réseau). Dans cette idyllique vision ministérielle, jamais personne – à commencer par le ministre Gérald Darmanin et les DG successifs des Finances publiques – ne s’est enquis auprès des agents de leur volonté ou non d’être « démétropolisés » !

Si on peut partager certains considérants, c’est quand même plutôt « au doigt mouillé » que le ministre a échafaudé l’hypothèse que les agents des grandes métropoles vivraient bien mieux en province (« en région », comme « y » disent pudiquement à la Capitale) : la vie y serait meilleure, les logements bien plus accessibles, moins chers et les m² plus grands, les temps de parcours moins longs, etc., etc.

Fait-on le bonheur des gens sans connaître précisément leurs attentes ? Pourquoi n'y a-t-il pas eu d'étude générale auprès des effectifs potentiellement concernés pour avoir une idée du volume de candidats intéressés par la « démétropolisation » ? Ne pouvait-on pas débattre avec les organisations syndicales des raisons peuvant motiver les agents à quitter les grandes métropoles ? De même s'agissant d'étudier l'importance et l'opportunité pour certains agents de rejoindre leur région d'origine, ne fallait-il pas également prendre en compte les possibilités de trouver un travail pour le conjoint, d'accéder à une offre éducative large et adaptée pour leurs enfants, etc. ? Autant de données objectivées que l’administration aurait dû analyser en amont et partager avec les représentants du personnel.

La CFDT Finances publiques aurait objecté qu’en jouant sur l’offre de logements sociaux dans les grandes métropoles, de places en crèche, d’offres de transport, d’indemnité de vie chère et autres*, le ministère aurait pu répondu aux inconvénients qu’il avançait.

La prise en compte des besoins des agents

Cependant, l’objectif de cette « démétropolisation » semble beaucoup plus lié aux m² de bureaux à récupérer et aux économies à réaliser. Dans ce cas, pourquoi l’Etat employeur jouerait-il sur des facteurs sociaux permettant à ses personnels de se maintenir dans les grandes métropoles avec des conditions de vie pérennes ?

Tartuffe découvert (NDLR : il fallait quand même oser prétendre que c’était pour améliorer la vie des agents…), le ministère tente de voir dans cette restructuration de la DGFiP une réponse gouvernementale à l’épisode des « Gilets jaunes », « à la crise de confiance envers l’Etat de populations éloignées des grandes agglomérations (…), à la dévitalisation des territoires et à la disparition de certains services publics ». N'y a-t-il pas ici un singulier paradoxe à affirmer vouloir lutter contre un mal auquel on n’est pas totalement étranger…

Quoi qu’il en soit, après avoir étrillé les effectifs de la DGFiP et son réseau depuis plus de 12 ans, c’est pourtant à notre direction qu’on demande de jouer le rôle que l’armée joua en son temps sur le territoire national. Et un brin démago, Gérald Darmanin envisage de « démétropoliser » des fonctionnaires de Bercy issus principalement …de la région parisienne. Symboliquement, cela renvoie en effet à la revanche des territoires contre la mégalopole, des oubliés contre les décideurs, des victimes des économies contre les tenants du Budget. Dans cette histoire, ira-t-on jusqu'à « démétropoliser » ceux qui décident des fermetures de sites et des délocalisation de services ? Le ruissellement, tant de leur savoirs que de leurs avoirs, serait certainement bienvenu dans lesdits territoires.

Dans le cadre de cette démétropolisation, l’administration a réalisé une grille de critères pour départager les villes candidates. L’appel à candidature pointe en outre des éléments à émouvoir tous les fonctionnaires : « des conditions de travail qui (…) soient les meilleures possibles », « de la couverture numérique », « des facilités d’accès au lieu de travail », « des possibilités de stationnements », « facilités pour faire garder et scolariser les enfants », etc.

Une liste de bon aloi dont les éléments seront, n'en doutons pas, le curseur minimal défini par l’administration en termes de conditions de travail correctes. La CFDT y veillera, comme elle entend que soit pris en compte des demandes légitimes et réitérées dans différentes instances : disponibilité d’un parc de voitures au bénéfice des agents nomades demandeurs ; conditions de stationnement ; remboursement de frais engagés au "marc le franc" dans le cadre des missions ; rémunération des heures supplémentaires ; prise en compte en terme d'emploi des niveaux d'écrétement ; offre de formations et accessibilité ; etc.

La CFDT souhaite que le dialogue social à la DGFiP ne se fasse plus en mode « concertation » où tout est joué d'avance et sert juste à cocher la case « vu les syndicats ». A l'occasion de ce comité de sélection et de ses futures réunions, la CFDT défendra les intérêts des personnels et du service public.

 

NB : en pièce-jointe, le compte rendu CFDT-CFTC de la première réunion du « comité de sélection »

En n’augmentant pas les salaires des fonctionnaires depuis 10 ans – un événement sans équivalent dans le monde du travail –, les agents ont vu leur possibilité de se loger « en centre ville » dans un appartement de taille décente s’amenuiser. En 10 ans, les agents ont perdu un potentiel de m² (parfois plus d'une dizaine de m²) et/ou vu leur temps de transport s’allonger de grosses dizaines de minutes en étant obligé de s'écarter des centres urbains.

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